Compositions:

Nous allons vous demander de prendre position à propos de sujets parfois utilisés par les politiciens pour obtenir vos votes (le service militaire obligatoire, les femmes dans l’armée, la peine de mort, les mariages “gay”, la religion liée ou séparée de l’éducation scolaire, la santé et les citoyens, etc…). Rien de bien neuf, et vous avez sans doute déja donné votre opinion sur la question à vos amis, et peut être dans des compositions de lycée. Nous vous donnerons aussi des sujets auxquels vous n’avez sans doute pas encore réfléchi : la vie des insectes; le rôle de l’éducation du point de vue de l’ensemble de la nation (pas du point de vue d’un étudiant ni de ses parents). 

Mais cette fois-ci, nous ne vous demandons pas votre opinion, mais votre pensée.

“Opinion” versus “Pensée”

Sur tous les sujets controversés ou non, tout le monde a une opinion. L’opinion est un mélange de choix émotionnel et valeurs sociologiques locales qui tournent autour de deux ou trois slogans ou principes qui nous paraissent percutants, et nous les avons peut-être déjà suivis avec des résultats positifs, mais il s’agit réellement d’un simple point de départ pour la pensée et la réflexion. Une opinion est ouvertement une tendance personnelle qu’il est futile de critiquer, parce que l’opinion représente votre premier sentiment sur la question, non pas votre pensée finale  ni votre être profond. C’est pourquoi l’on dit que tout le monde a le droit d’avoir une opinion sans être accusé d’irresponsabilité. Tout devient plus sérieux si un beau jour, la société dépend de votre pouvoir décisif, qu’il s’agisse de voter, de se trouver membre d’un jury civil à une court de justice, etc…,  ou si vous avez  le devoir de persuader qui que ce soit de quoi que ce soit. Etes-vous efficace aujourd’hui? Pourriez-vous le faire à présent? Vous avez besoin d’outils de vocabulaire et d’une habitude de présenter des propositions qui soient favorablement reçues par ceux qui vous lisent ou vous écoutent. (Un sujet de composition possible serait: “Est-ce que les citoyens d’un pays ont le droit moral de voter sans avoir réfléchi et sans s’être informé? Justifiez votre réponse”)


Ce que nous vous demandons ici est de développer et approfondir votre expression et votre capacité verbale. Il s’agit de l’art du débat, dont certains professionnels ont un besoin vital, tels les politiciens et les avocats, les théologiens et les gens d’affaires, les administrateurs, les vendeurs, tous ceux qui doivent défendre un point de vue pour convaincre peut-être l’adversaire même, pour se justifier et se défendre, et de toutes façons, pour s’exprimer avec succès, et augmenter leur pouvoir de décision et leur sens de responsabilité .


La pensée, étymologiquement, c’est peser les choses: peser le pour et le contre. C’est aussi la démarche que vous suivez lors d’un débat intérieur quand vous devez prendre une décision importante pour vous: épouser quelqu’un ou non, acheter telle maison ou telle autre, voter pour un candidat ou l’autre, etc… Faites une liste en deux colonnes: Pour et contre. Développer les deux côtés aussi énergiquement que possible, et tranchez (prenez une décision justifiée). Vous travaillez en noir et blanc (pour et contre) et vous terminez par un noir noir, blanc blanc (une position radicale) ou un gris (une position nuancée).


Si vous réfléchissez fortement, vous verrez que la position qui vous paraissait évidente à première vue ne l’est peut-être plus, ou n’est plus si forte. Ça ne veut pas dire que vous ne la conservez pas (votre position initiale), mais cette fois-ci, ce n’est pas une opinion, c’est une position, pesée, réfléchie, et susceptible de montrer que vous avez  pris en considération les objections et réserves que le reste du monde vous apporte. Et celà ne veut pas dire que votre pensée est arrêtée et qu’elle ne peut plus changer quels que soient les nouveaux arguments ou les nouvelles données qui se présentent. Il s’agit finalement de montrer que vous avez l’habitude de  mesurer les conséquences et les répercussions que des actions non réfléchies peuvent avoir sur vous et les autres, et que vous refusez l’arbitraire. Evidemment, il y a des positions plus approfondies ou plus nuancées que les autres, plus informées que les autres, plus humanitaires ou plus violentes, plus essentielles ou superficielles que d’autres, et plus persuasives, plus logiques. Nous ne notons pas la coloration morale (cynique, éthique) excepté le sophisme qui porte sur la mauvaise foi et une fausse logique (une rhétorique qui repose sur un effet de pouvoir). Imaginez que vos auditeurs sont neutres ou peu enclins à penser comme vous mais justes et non hostiles. Ainsi, votre exposition sera plus détaillée et plus habile. Et c’est cela que nous notons, avec le vocabulaire dont vous avez besoin et qui vous est présenté dans votre livre: Voyage au bout de l’écrit.

Exemples négatifs:

Exemple 1. a: Je pense que les gens qui volent les richesses des autres doivent être punis: ils doivent souffrir physiquement, et quand ils sont malades les médecins ne devraient pas leur donner de médicaments pour atténuer leur douleur, et s’ils meurent tant pis pour eux, car nous ne leur devons pas d’assistance.

Exemple 1. b: Je pense que les voleurs sont libres de faire ce qu’ils veulent et tout appartient à ceux qui prennent. Ceux qui se font voler se sont mis dans les conditions de se faire voler, et tout est de leur faute. Ils l’ont bien mérité et c’est éducatif pour eux. La prochaine fois, ils feront attention. On devrait donner des contraventions à ceux qui se laissent voler.

Ces deux exemples, meme un peu developpés pour tenir en deux pages, et même s’ils sont impeccablement écrits sont deux exemples de positions extrêmes qui ont besoin de sérieuses justifications. Ensuite, vous ne parlez que de votre perspective (je), sans écouter celle des théologiens divers, celle des gens autres que ceux qui partagent étroitement cette perspective extrême sans faillir. L’opinion semble volontairement arbitraire, telle une insulte aux autres Canadiens qui ne partagent pas votre émotion.


Telle quelle, dans 1a, l’opinion semble venir d’un coeur rempli de haine et asocial, même si le vol est toujours un domage anti-social. La personnalité projetée ici est volontairement offensive, donc promouvant une société d’agression. Quant à la deuxième position (1b) elle semble entièrement partiale et paradoxale. Elle est centrée sur l’auto-gratification du voleur sans aucune attention pour la vie de quelqu’un d’autre. Les deux positions, auxquelles n’importe quel teenager raisonnable peut objecter, doivent être justifiées. La seconde est paradoxale mais certains la tiennent (certains ideologues, cyniques, etc…); la première peut se justifier dans un contexte précis (de raréfication extrême et dans une nation d’aveugles selon Diderot). Mais telles quelles elles sont irrecevables parce que non justifiées. Ces deux positions sont étroitement centrées sur “je” et partagent un degré de violence que la société n’accepte pas dans son ensemble. Il y a une opinion et zéro analyse ni pesée/pensée, justification, explication, dévelopement. Généralement, une telle composition est trop courte et répétitive parce qu’il n’y a pas assez de matière—la personne ne démords pas d’une seule position de condamnation ou d’adhésion.  Au point de vue de la note, si tout est parfait au niveau de la grammaire et du vocabulaire, c’est un 20%. Sinon, à raison de moins un point par faute de français, vous flirtez avec 0%.

Exemple 2:  Comment considérer le fast-food ou vite-prêt? Mon premier job était à MacDonald. Statistiquement, les premiers emplois des teenagers, leur première indépendance monétaire dépend d’une telle chaîne de magasin. L’initiation sociale au monde du travail est une fonction extraordinaire que fournit massivement ce genre de restaurant. Ils font des donations humanitaires et ils nourrissent des familles complètes qui n’auraient absolument pas les moyens de manger ailleurs. Ce sont de vrais magasins soutenus par le peuple, pour le peuple---la démocratie en action.

Bien sûr certaines personnes disent que cette nourriture bon marché est nocive pour la santé, et que le coût réel de ces restaurants est une mortalité accélérée pour les clients qui souffrent de malnutrition et d’obésite—quelqu’un a fait un film à ce sujet. Il y en a même qui disent que la sécurité sociale doit couvrir des frais médicaux énormes à propos des maladies causées par ces industries.

Mais ce n’est pas un MacDo ici ou la qui crée l’obésité: ce sont la génétique, la psychologie affective, les autres habitudes d’achat alimentaires, la pollution ambiante, et le style de vie général de ces gens qu’il faut considérer. Les enfants sont superbement traités à MacDo. Connaissez-vous d’autres restaurants avec espace de jeu et cadeaux automatiques pour les enfants? Moi, je suis devenu manager de mon restaurant vite-prêt et je vais encore avoir une promotion le mois prochain. Je ne comprends absolument pas la chasse aux sorcières que les médias lancent contre ce mode de restauration.

Ce travail est un 77% sans fautes, et un B plus bas, peut-être un C avec fautes. La personne considère certaines objections et reste dans une optique—ici démocratique-économique.  Il serait préférable de donner le titre du film auquel vous pensez, et d’identifier les gens qui objectent aux coûts médicaux. Il semble que l’auteur imagine que ses lecteurs sont très disposés à  le/la suivre, ou a eu une paresse de pensée. Cependant, une nouvelle problématique apparaît dans la conclusion mais il s’agit d’un détail de la clientèle (les enfants). Pourquoi ne pas parler d’autres clients? Mais si cette nouvelle problématique était essentielle ce serait considéré positivement (un déplacement du débat sur quelque chose de plus important concernant la société et les restaurants). Ici il serait tentant de considérer cette adition de dernière minute négativement parce qu’une nouvelle objection est soulevée en fin de course sans égards à une objection connue (on impute souvent aux MacDo de cajoler les enfants pour qu’ils fassent pression sur leurs parents et pour fidéliser la clientèle). Ni cette objection est énnoncée, ni elle ne connaît de réponse. Ce point serait mieux placé dans le premier paragraphe avec une réponse dans le second. Pourquoi ne pas considérer d’autres types de clients pendant qu’on y est? Les vieux qui trouvent un journal gratuit à MacDonald, les diabétiques…) Un autre problème est que la personne est employée par un vite prêt et son objectivité peut donc être mise en doute.

Faire intervenir l’exemple de soi (je) est à double tranchant. Pro: vous parlez de quelque chose de concrêt qui vous est arrive vous demandez un vote de sympathie, ou alors vous mettez en jeu l’attaque personnelle pour faire sentir à l’adversaire que leur jugement impersonnel-abstrait, est mis en échec devant votre exception. Une autre possibilité est que vous vous donnez en exemple parce que ce que vous dites s’applique à tout le monde, même à vous, ou bien à vous par exemple.
Et cependant, ici, les deux dernières phrases de la conclusion sont du plus mauvais effet et contre-productives dans l’entreprise de persuasion. La première phrase de conclusion était beaucoup plus puissante. Comme il a été signalé plus haut, la phrase “les enfants…” est à mettre dans le premier paragraphe (pour les vite-prêts). Il manque une introduction qui est combinée au premier paragraphe, parce que le biais penchant outrageusement pour les vite-prêts est plus qu’évidente. Ce genre de raccourci n’est pas recommandé pour les debutants. Il n’y a aucun respect pour les objections connues, ni une vraie attention aux autres arguments. Il s’agit presque d’une promotion pour le fast-food. Aussi bien écrit soit-il, c’est à dire sans fautes de français, ce travail ne peut pas aller plus loin qu’un 77% parce qu’il est trop partial (et ce dès le depart) et pas assez musclé contre les objections. (cf. recommendations pour les introductions).

NOTEZ BIEN:

Une autre façon d’échouer serait de ne pas parler du fast food. Par exemple, de le condamner essentiellement parce qu’il vend de la viande et le restaurant devrait être végétarien, ou parce que la nourriture ne devrait jamais être vendue dans un restaurant—les restaurants ne devraient pas exister parce que la société devrait fournir la nourriture selon une économie qui n’existe plus ou pas encore sur la planète...Ceci n’est valable qu’en conclusion et uniquement si votre discussion y aboutit. Beaucoup d’autres restaurants ne sont pas végétariens et les fast food commencent à avoir des pizza ou salades végétariennes. Le sujet ici est le vite-prêt comme phénomène existant, et ce n’est pas une institution d’Etat ayant en vue le service de tous les Canadiens, ou opérant à un changement d’économie, mais un commerce du marché capitaliste le plus vaste qui nous régit suivant la logique de l’offre et de la demande et selon les normes gouvernementales de l’hygiène dans les commerces de restauration. Si votre composition peut montrer les liens entre le fast food et l’économie existante ou virtuelle tout va bien, mais imaginer un fast food qui n’en soit pas un tombe dans une logique fragile qui menace de tomber dans le hors sujet. Un hors sujet reçoit automatiquement un 0%.Consultez votre livre pour les autres instructions plus détaillées qui vous permettent d’obtenir les meilleures notes, de 80% a 100%.